L’ouverture des données publiques pourrait devenir l’un des leviers les plus puissants pour freiner la corruption en Haïti, où l’opacité institutionnelle demeure la norme et où les scandales successifs ont érodé la confiance citoyenne.
Dans un pays où les rapports de la Cour des comptes et de l’ULCC peinent à produire des conséquences concrètes, l’open data offrirait une rupture : rendre immédiatement visibles les dépenses de l’État, les contrats, les exemptions douanières, les projets financés, les affectations budgétaires et même les indicateurs sociaux que les autorités publient rarement de manière exhaustive.
L’expérience internationale démontre que la transparence systémique n’est pas une utopie. Le Kenya, grâce à sa plateforme d’Open Contracting, a annulé des dizaines de marchés entachés d’irrégularités et réduit les coûts de passation. L’Ukraine, avec le système ProZorro, a économisé des centaines de millions de dollars en soumettant chaque achat public au regard du public, des médias et des développeurs capables d’automatiser la détection d’anomalies. Plus près d’Haïti, le Sénégal a renforcé le contrôle citoyen en publiant les budgets locaux et les projets municipaux en format ouvert.
Pour Haïti, une feuille de route réaliste tiendrait en trois étapes. D’abord, obliger toutes les institutions à publier en formats ouverts leurs dépenses, leurs contrats et les rapports déjà légalement publics. Ensuite, unifier ces données dans un portail national unique, simple et hébergé de manière sécurisée, loin des pressions politiques. Enfin, encourager la société civile, les journalistes et les développeurs à réutiliser ces données pour créer des outils de suivi, d’alerte et d’enquête.
L’open data ne fera pas disparaître la corruption du jour au lendemain. Mais il offre un changement de culture : gouverner sous le regard du public. Dans une République longtemps étouffée par le secret, la transparence pourrait enfin devenir un instrument de responsabilité.
Josette Larosine
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